La conscience
Conscience
Etymologie
Du latin cum qui signifie "avec" et scientia qui signifie "connaissance". Au sens strict du terme, la conscience est le fait d’être accompagné du savoir, d’être savant. Ce savoir porte sur soi et sur le monde qui nous entoure.
Conscience psychologique
Relation intériorisée médiate ou immédiate qu’un être est capable d’établir avec le monde dans lequel il vit et avec lui-même ou ses actes.
Conscience spontanée
Conscience au sens où un être est réveillé, attentif et conscient du monde qui l’entoure.
Conscience réfléchie
Conscience au sens où un être prend conscience qu’il pense et se contemple lui-même en se mettant à distance, à la manière dont on se met devant un miroir pour qu’il nous reflète une image entière et complète de soi à laquelle nous n’avons habituellement pas accès.
Conscience morale
Capacité mentale à porter des jugements moraux sur des actes accomplis par soi ou par autrui.
La conscience de soi est-elle ce qui construit le sujet ou est-ce le sujet qui fait advenir la conscience ?
De quelle nature est la conscience ? Est-elle une réalité immatérielle où nos pensées s’entreposent ? Ou bien est-elle une simple condition nécessaire à l’élaboration de nos pensées ?
Si elle n’est pas une chose mais une activité par laquelle nous prenons conscience de nous-mêmes, alors il y a de forte chances qu’elle soit subjective, dès lors la conscience n’obscurcit-elle pas le rapport de l’homme à lui-même ?
Quelle sont les limites de la conscience humaine ? Un homme conscient de lui mais immoral peut-il exister ?
Concepts
Sujet
Au sens métaphysique le sujet est un être réel doté de qualités et qui produit des actes. Le sujet est à la fois objet de la pensée et de la connaissance et le support de certaines autres réalités, comme la conscience ou la perception.
Introspection
De specto = regarder et intra = à l’intérieur . Processus par lequel le sujet procède à une analyse de ses propres sentiments, de ses motivations, de ses objectifs. L’expérience de la conscience se fait nécessairement par l’introspection puisque personne ne peut en faire l’expérience à la place du sujet en question.
Moi
Terme très largement approfondi par le neurologue autrichien Sigmund Freud et qui désigne la partie la plus consciente de notre personnalité, celle dont nous avons conscience.
Existence
Au sens propre, désigne le fait d’exister pour une entité particulière. Dans le cas du sujet, la conscience de soi fait partie de la définition du sujet, on peut ainsi dire que le sujet existe parce qu’il est conscient.
Pensée
Activité psychique ayant pour objet la connaissance et qui caractérise l’espèce humaine. En tant que l’homme est conscient de ce à quoi il pense et qu’il est conscient qu’il pense, il se distingue des autres animaux.
Repères utiles
Objectif / Subjectif / Intersubjectif
Est objectif ce qui se rapporte à l’objet de la connaissance. En ce sens, un jugement est objectif quand il ne dépend pas, relativement à son contenu de la personne qui le prononce ; il tend donc à être universel. Les vérités mathématiques sont un modèle de vérités objectives : quelle que soit la personne qui l’affirme, deux et deux font toujours quatre.
Est subjectif un jugement qui se rapporte au sujet de la connaissance. En ce sens un jugement est subjectif quand il relève de la personnalité de celui qui le prononce ; il tend donc à être relatif. « Je trouve que ce plat est bon. » est un jugement subjectif.
Est intersubjectif tout ce qui concerne les relations de personne à personne. Le fait qu’il y ait intersubjectivité signifie que l’être humain n’est jamais seul au monde, mais toujours déjà en relation avec les autres. Confronter sa pensée à celle des autres, dans la recherche scientifique et philosophique, mais aussi dans le domaine moral et esthétique montre le rôle de l’intersubjectivité dans la visée de l’universel.
Dans le domaine de l’esthétique, par exemple, la question peut se poser de savoir si le jugement de goût est objectif, ou bien si l’appréciation d’une œuvre d’art relève de la subjectivité, c’est-à-dire des préférences individuelles. Mais à partir du moment où le jugement de goût fait l’objet d’une discussion qui met en relation plusieurs personnes (au moins deux, qui se demandent par exemple si telle œuvre d’art est belle), et que la parole est mobilisée par chacun pour défendre sa position, on entre dans le domaine de l’intersubjectivité.
La conscience relève ainsi de la subjectivité la plus profonde, puisque personne ne peut mieux connaitre ses pensée que soi-même, cependant il est intéressant de voir qu'autrui peut nous apporter un jugement extérieur et nous permettre de mieux nous connaitre. La conscience et la connaissance de soi relèvent plutôt de l’intersubjectivité que de la seule subjectivité.
Identité / Egalité / Différence
L’identité caractérise deux choses qui sont égales en tous points, autrement dit, qui sont les mêmes. Du latin identitas, "qualité de ce qui est le même".
L’égalité caractérise deux choses qui sont les mêmes en certains points, qui se ressemblent, c’est un degré de ressemblance moindre que l’identité. Du latin aequalis, "du même niveau".
La différence caractérise deux choses qui ne sont pas égales en tous points, c’est-à-dire qui ne sont pas identiques. Du latin differentia, "différence".
La conscience est importante pour le sujet puisqu’elle lui permet d’être lui-même et donc de faire en sorte que le sujet soit identique à lui-même, qu’il soit qui il est et non pas différent de celui qu’il est.
Auteur(s)
René DESACARTES
Discours de la méthode, 1637
Dans cet ouvrage, ce philosophe français du XVIIe siècle cherche une méthode pour fonder la science et atteindre la vérité. Dans la quatrième partie du Discours, il écrit "Je pense donc je suis". Ces mots renvoient à la seule et unique certitude absolue, celle de notre existence, garantie par le fait même de pouvoir formuler cette pensée. Après avoir mis en doute les évidences sensibles ou les certitudes rationnelles, il en vient à poser la conscience de soi et la pensée comme la preuve de notre existence. Ainsi il nous est impossible d’avoir la certitude d’avoir un corps sensible mais il est absolument nécessaire et indubitable que nous pensons et que par ce fait même nous existons.
HEGEL
Il existe pour Hegel deux moyens d’acquérir la connaissance de soi et de se contempler. D'une part une manière théorique qui consiste à s’interroger sur soi par la réflexion et la pensée. D'autre part une manière pratique qui consiste à se voir à travers les actions que l’on fait sur le monde extérieur que l’on forge à son image. Ainsi un artiste peut se voir dans ses œuvres et avoir conscience de lui-même.
Blaise PASCAL
Pensées, 1670
"L’homme est un roseau, le plus faible de la nature, mais c’est un roseau pensant."
La pensée est l’essence de l’homme, elle fait sa dignité et le rend véritablement homme. Cependant elle en fait un être conscient de sa petitesse dans le monde. Ainsi le prix de la lucidité de l’homme sur sa condition est sa fragilité relative puisque l’homme prend conscience de sa faiblesse.
KANT
Pour Kant, à la différence de Descartes, la conscience n’est pas une chose mais elle est une activité, une fonction de synthèse. L’homme, contrairement aux animaux, est doué de cette fonction de synthèse lui permettant d’accompagner ses actes quotidiens d’un "je pense".
Cependant, cette fonction s’acquière progressivement. Ainsi un enfant qui parle de lui à la 3e personne n’a pas conscience que le besoin de se nourrir qu’il ressent vient de lui-même, c’est pour cela qu’il le formule à la 3e personne. C’est seulement avec l’utilisation du "je" que l’on peut parler d’une prise de conscience. En utilisant le "je", le sujet se pense en tant que sujet et a conscience d’avoir faim ou soif.
Enfin, la conscience de soi s’accompagne, selon Kant, de la dignité humaine puisque l’homme s’attribue à lui-même ses états de conscience et se voit responsable de ses actes. Il devient ainsi une personne doué d’une conscience morale.
ROUSSEAU
Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes, 1755
Selon Rousseau, l’état de nature dans lequel vivent les hommes est un état pacifique où règne une "pitié naturelle". Par respect pour autrui qui lui est semblable, l’homme vise à sa propre satisfaction tout en faisant le moindre mal possible aux autres.
Dans un autre ouvrage, le philosophe français de l’école du droit naturel met en évidence la présence d’une conscience morale en tout homme, qu’il appelle "instinct divin". Ainsi la conscience morale est innée selon Rousseau et représente une valeur universelle s’imposant aux hommes.