La raison
Questions liées à la notion
La raison permet-elle de connaître le réel ?
Un rapport purement rationnel au réel permet-il véritablement de le connaître ?
La raison est-elle le critère d’humanité par excellence ?
Un pur esprit rationnel, dénué de corps, pourrait-il être qualifié d’être humain ?
Qu’est-ce qui définit l’homme ?
La raison est-elle un frein ou un moyen pour connaître le réel ?
La connaissance du réel ne passe-t-elle pas par un double rapport à la fois empirique et rationnel ?
Concepts
Raison
Faculté permettant à l’être humain de connaitre, juger et agir conformément à des principes. Cette faculté est propre à l’homme et lui permet de créer des critères de vérité pour atteindre ses objectifs, ce qui n’est pas systématique chez les animaux.
Raisonnement
Processus cognitif permettant de poser un problème de manière réfléchie en vue d’obtenir un ou plusieurs résultats. De manière plus précise, un raisonnement est une opération logique qui, en utilisant des implications et des outils de logique, aboutit à un résultat, ou du moins à une conclusion.
Rationalité
En philosophie, en sociologie et en économie, la rationalité est un concept servant à mesurer la capacité de chacun à utiliser sa raison pour atteindre ses fins.
Réel
Le réel désigne le monde extérieur que nous percevons par nos sens et qui existe de manière autonome, en dehors de notre pensée. Il fait souvent l’objet de débat quant à la démarche scientifique à suivre pour le connaître.
Logique
Du latin logos, signifiant parole et raison, la logique est l’art du raisonnement qui, en utilisant différents outils, permet d’atteindre, de manière rationnelle, un résultat.
Loi
Une loi est un postulat basé sur des observations expérimentales répétées qui décrivent certains aspects de l’univers.
Idéalisme
Courant de pensée qui considère que le réel est structuré par quelque chose de nature spirituelle ayant trait aux idées.
Rationalisme
Courant de pensée qui pose que la connaissance repose sur la raison et non sur les sens. Il s’oppose à l’empirisme.
Empirisme
Courant de pensée qui pose que la connaissance repose sur l’expérience et les sens. Il s’oppose au rationalisme.
Perspectivisme
Doctrine qui défend l’idée selon laquelle la réalité se compose de la somme des perceptions que nous avons d’elle. Autrement dit, c’est par le regard humain que se construit la réalité, et elle peut être modifiée en fonction des nouveaux points de vue qui apparaissent.
Scepticisme
Courant en philosophie selon lequel l’homme ne peut rien affirmer de certain dans aucun domaine. Cette doctrine est fondée par Pyrrhon, ce dernier préconise alors, si l’on prétend être sage, de n’émettre aucun jugement afin de ne pas être dans l’erreur.
Repères utiles
Absolu / Relatif
Est absolu ce qui est indépendant et ne varie pas. Est relatif ce qui dépend d'autre chose et varie en fonction de cette chose.
En nous référant aux termes relatif et absolu nous pouvons distinguer la vérité de l’opinion. L’opinion est relative, puisqu’elle dépend de la subjectivité de l’individu. Le sophiste Protagoras affirme que toute connaissance est relative et relève de l’opinion. Mais le philosophe qui s’y oppose défend l’existence de la vérité qui, quant à elle, vaut absolument, c’est-à-dire indépendamment des caractéristiques de l’individu qui la prononce.
Les vérités mathématiques ou les raisonnements logiques qui suivent de manière rationnelle un cheminement aboutissent de manière absolue à un résultat, ce résultat ne dépend pas des mathématiciens mais le cheminement logique et rationnel mène systématiquement à un seul et unique résultat.
Contingent / Nécessaire
Est contingent ce qui peut être ou ne pas être. Un événement contingent est donc un évènement qui peut advenir ou bien ne pas advenir comme le fait d’aller à la boulangerie ou de ne pas y aller. Est nécécessaire ce qui ne peut pas ne pas être. Un événement nécessaire est un événement qui ne peut pas ne pas être, comme la fin du monde qui est une réalité inéluctable.
L’homme est un être vivant doué de raison, ainsi la raison est nécessaire chez l’homme, elle participe de sa définition et de son essence.
Essentiel / Accidentel
Est essentiel ce qui correspond à l’essence de la chose, de l’être, ce qui la définit dans sa nature la plus profonde. Est accidentel ce qui arrive accidentellement, et donc non nécessairement, à l’être. Le fait que l’on puisse faire usage de notre pensée et de notre raison est un critère essentiel dans notre humanité, alors que être blond, brun ou roux est un accident, cela ne détermine pas notre essence.
Idéal / Réel
Ce qui est idéal renvoie à ce qui est inatteignable et imaginaire mais qui peut tout de même être atteint. Du latin idea, le mot "idée" renvoie, depuis Platon, à un objet de la pensée relevant du domaine de l’esprit et non du corps, donc de ce qui est immatériel. Ce qui est idéal est donc ce qui relève du monde des idées. Ce qui est réel renvoie à ce qui est matériel et existe en acte dans le monde. Du latin res, "chose", le réel désigne ce qui nous entoure, qui a un corps et une essence.
Expliquer / Comprendre
Du latin explicare qui signifie "déplier", le verbe expliquer renvoie au fait de remonter les causes qui ont donné lieu à tel ou tel phénomène. Du latin comprehendere qui signifie "saisir" ou "prendre", le verbe comprendre renvoie au fait de saisir le sens, la direction ou le but de quelque chose. Le fait de comprendre revient à faire la synthèse, en restituant à chaque élément son sens dans l’unité de l’objet étudié.
La différence entre les deux termes réside donc dans les objets dont il est question. Quand l’explication porte sur la cause, la compréhension porte sur ce qui est de l’ordre de la conséquence et de la finalité.
Ainsi il est possible de ne pas comprendre le comportement d’une personne, mais en obtenant des explications, comme par exemple que la personne soit malade, on obtient une réponse qui nous permet d’expliquer les causes et de comprendre le comportement de cette personne.
Auteur(s)
Friedrich NIETZSCHE
La volonté de puissance, 1901
Selon Nietzche, la lecture du monde en tant que la réalité est parfaitement rationnelle n’est qu’une illusion due au fait que l’homme veuille voir le monde à son image pour y être à l’aise. La lecture que les hommes font du monde est erronée puisque l’homme grossit et simplifie le réel en lui attribuant des lois, des règles et des concepts ; le monde se réduit alors uniquement aux régularités qu’on y trouve et non aux différences et aux nuances qui en font pourtant partie.
Seul l’artiste est capable de sortir de ce rapport utilitaire dans lequel le scientifique et le philosophe sont piégés. En effet l’artiste est capable de multiplier les points de vue pour se rapprocher de ce que le monde est véritablement : une réalité chaotique et désorganisée.
HEGEL
Principes de la philosophie du droit, 1820
"Ce qui est rationnel est réel et ce qui est réel est rationnel."
À l’inverse de Nietzsche, Hegel est convaincu que le réel est rationnel et qu’une raison universelle agit tel un principe d’ordre dans le monde et organise ses composants.
L’histoire des peuples, l’histoire de toute l’humanité ne fait que réaliser la raison dont l’objectif est la réalité. Ainsi, progressivement, les peuples tendraient un à un à un plus grand degré de liberté, ce qui se concrétise dans la tendance des États à devenir des démocraties par exemple.
Ainsi, la raison est dans toute chose et dirige le réel.
David HUME
Selon cet empiriste et sceptique modéré, il existe des connaissances auxquelles l’homme peut avoir accès, cependant elles ne sont pas certaines mais probables. En effet, à l’inverse du fondateur du scepticisme antique, Pyrrhon, qui affirme qu’aucune connaissance n’est possible et qu’il est nécessaire de s’abstenir de juger pour ne pas être dans l’erreur, Hume, quant à lui, soutient l’idée selon laquelle les sciences de la nature sont des vérités probables, même si les lois dites "universelles et nécessaires" ne sont pas certaines.
Hume incarne une position intermédiaire entre les rationalistes purs qui pensent que le réel tout entier peut être connu par la raison de manière certaine et les sceptiques qui refusent toute connaissance.