La religion
FICHE NOTIONS
Si la religion est un fait universel et aussi ancien que l’humanité, n’est-elle pas une partie essentielle de notre humanité ? Ou bien au contraire, la religion est elle un frein à notre humanité en tant qu’elle est conservatrice de valeurs anciennes et passées ?
Est-elle une libération de soi ou une aliénation à un ordre supérieur ?
La religion est-elle un fait social ou un fait spirituel ?
La religion n’est-elle qu’une superstition parmi d’autres ? N’est-elle qu’une superstition douée d’un caractère social ?
La foi et la raison s’excluent-elles ?
Peut-on être croyant sans être pratiquant ?
Concepts
Religion
Au sens le plus général, elle désigne la reconnaissance, par l’être humain, d’un principe supérieur de qui dépend sa destiné. Elle peut néanmoins être divisée en deux catégories qui supposent chacune un Dieu de nature différente.
Religion dite relevée
Repose sur la « révélation », c’est-à-dire une transmission surnaturelle d’un message par la voix de prophètes ou d’envoyés de Dieu.
Religion naturelle
Nait spontanément de la réflexion ou de la sensibilité, indépendamment d’une éducation religieuse.
Dieu
Ce terme a différents sens dans différentes conceptions.
Dans le polythéisme, il est un être supérieur doué de pouvoirs sur l’homme et d’attributs particuliers. Dans le monothéisme, il est un être éternel, unique, créateur et juge de toute chose. Là encore deux courants de pensées peuvent êtres distingués, la religion de la révélation et la religion naturelle. Chacune admet un type de Dieu différent. Les philosophes font souvent partie de la seconde catégorie, à tel point que l’on parle de « Dieu des philosophes ».
Dieu de la révélation
Le Dieu que l’on retrouve dans les textes sacrés, tel que la Bible, le Coran ou la Torah.
Dieu des philosophes
Terme n’ayant un lien que très faible avec les textes sacrés mais dont les philosophes se servent pour questionner la création du monde, l’existence du Bien ou du Mal, et d’autres implications morales. La question de la théodicée (la justice divine) qui pose le paradoxe de l’existence du mal alors même que Dieu existe et est omniscient, est l’une de leurs plus grandes problématiques.
Divinité
Caractère de ce qui a une nature divine, peut aussi désigné un Dieu.
Sacré
Ce qui est sacré appartient à un domaine interdit et inviolable et fait l’objet d’une vénération religieuse. Le sacré s’oppose au profane, ce qui est profane est étrangers à la religion.
Foi
Au sens large, la foi est l’assurance donnée d’être fidèle à sa parole, d’accomplir ce que l’on a dit, de se contraindre seul. Selon la Bible, la foi désigne une ferme assurance des choses qu’on espère mais qu’on ne voit pas, avoir la foi c’est avoir espoir sans avoir de preuves de ce en quoi l’on croit.
Dogme
Les dogmes sont des vérités fondamentales qui ne sont plus remises en question. La religion catholique pose, par exemple, la Trinité et la Transsubstantiation comme des dogmes.
Pratique
Façon de faire, action socialement transmise. Une pratique religieuse, dès lors, désigne une pratique supposant un enseignement préalable qui est en rapport avec la religion, comme le fait d’aller à la messe ou de faire des événements religieux.
Rite
Ensemble des cérémonies ou usages dans une communauté religieuse ainsi que leur organisation.
Superstition
Croyance manifestement irrationnelle qui n’a pour origine qu’un mélange d’ignorance, de désir et de crainte.
Secte
Groupement de personnes adeptes d’une même doctrine.
On distingue plusieurs attitudes face au fait religieux :
Athéisme
Courant de pensée qui nie l’existence de Dieu.
Agnosticisme
Courant de pensée qui affirme que l’on ne peut rien connaître de Dieu. L'agnostique s’abstient de tout jugement quand à l’existence ou non de Dieu.
Théisme
Courant de pensée affirmant l’existence d’un Dieu personnel et extérieur au monde.
Déisme
Courant de pensée se bornant à croire à l’existence de Dieu sans rien affirmer d’autre à son sujet.
Repères utiles
Transcendant / Immanent
Ce qui est transcendant est d’une réalité supérieure aux autres. Le terme de transcendance renvoie aussi à un principe extérieur et supérieur qui détermine les choses sans que l’on puisse toujours en saisir les causes. Dieu ou le temps sont des entités transcendantes, en tant qu’elles existent à un degré ontologique (c’est-à-dire un degré d’existence) supérieur au nôtre. Ce qui est immanent est ce qui est contenu dans la nature d’un être, ce qui ne provient pas d’un principe extérieur.
Ainsi, est transcendant ce que l’on peut tenter de saisir sans jamais comprendre, et est immanent ce qui provient de nous-mêmes.
Tout ce qui touche au divin, à la religion et au domaine de la croyance relève de la transcendance puisqu’il est impossible pour les hommes de comprendre les principes des religions et de leur fonctionnement. La croyance que les hommes ont en Dieu est d’un degré de réalité supérieur qui ne peut, pour les véritables croyants, pas être remis en question.
Croire / Savoir
Croire signifie tenir une chose pour vraie, sans être capable de la prouver ou de la démontrer. La croyance est ainsi subjective, et peut être sujette au doute, à l’incertitude et même se révéler fausse. Savoir signifie adhérer à une idée, tout en étant certain qu’elle est vraie. Contrairement à la croyance, le savoir est solide car fondé et donc objectif. C’est la raison pour laquelle la sagesse de Socrate réside dans le fait, qu’à la différence de ses adversaires, il ne croit pas savoir ce qu’il ne sait pas. Dit autrement, Socrate sait qu’il ne sait pas.
La religion relève ainsi du domaine de la croyance qui n’est ni fondé sur la raison ni objective.
Auteur(s)
Selon Saint Anselme, Dieu est un « être tel que aucun être plus grand ne saurait être conçu ».
Or, penser Dieu dans l’intellect seul est moins grand que de le penser à la fois dans l’intellect et dans le réel. Donc si Dieu est l’être tel que rien de plus grand ne saurait être conçu, et que concevoir quelque chose qui existe est plus grand que quelque chose qui n’existe pas, alors Dieu existe.
Exemple
La peinture que fait le peintre a un degré de réalité et d’existence plus grand que quand le peintre avait seulement l’idée de la peinture dans son esprit. De même, il est plus « grand » d’exister que de ne pas exister pour Dieu, donc il existe.
Pour Durkheim, précurseur de la sociologie moderne, la société et la religion sont deux réalités étroitement liées. En effet, l’une comme l’autre transcendent l’individu. C’est l’ « effet de la vie collective » qui est, selon Durkheim, à la base de ce sentiment de transcendance et de cette possibilité qu’ont la société et la religion d’élever les individus, cette vie collective est notamment visible lors des cérémonies religieuses.
Durkheim analyse cette relation à partir du « totémisme », qu’il considère comme la plus ancienne et la plus élémentaire forme de religion. Ainsi le « totem » utilisé comme élément sacré au cours de rites sacrés représentait à la fois une divinité et un clan. L’objet réel de la croyance des fidèles est par conséquent la société. Cette dernière « est à ses membres ce qu’un Dieu est à ses fidèles ».
Ainsi religion et société s’entrecoupent dans leurs définitions et sont indissociables.
« Le cœur a ses raisons que la raison ignore ».
Selon Pascal, il faut reconnaître les limites de la raison, par exemple qu’elle ne peut pas nous prouver avec certitude que nous ne sommes pas dans un rêve en ce moment même. Ainsi une autre source de la connaissance est introduite, qui ne serait pas rationnelle mais intuitive et que Pascal appelle le « cœur », opposé à la « raison ». L’existence de Dieu fait partie de ces vérités que nous ne pouvons démontrer mais qui relève de l’intuition. L’une des conséquences d’attribuer l’existence de Dieu à l’intuition pascalienne est la présence d’une certaine relativité. En effet, l’existence de Dieu ne peut faire l’objet que d’une évidence intime dont la raison ne peut pas et n’a pas à rendre compte.
« La religion (…) est l’opium du peuple ».
Selon Marx, en donnant de l’espoir aux hommes en leur promettant un paradis pour leurs bienfaits et l’enfer pour leurs méfaits, la religion fait supporter aux hommes les conditions de vies très contraignantes du monde réel. À la manière dont l’opium déforme la réalité tout en rendant le sujet plus docile, la religion amoindrit les envies de révolution des hommes en fixant leurs objectifs sur leur vie dans l’autre monde. En ce sens, Marx déplore l’effet de la religion sur les masses puisqu’elle empêche le changement.