Les matières
Fiche vérifiée
*Limité à 30s

La morale n’est-elle qu’une convention sociale ?

NOTIONS : LE MORALE – LA CULTURE

Introduction

Analyse des termes du sujet : définitions et distinctions

La morale est ce qui définit les conduites considérées comme bonnes ou mauvaises. Un jugement moral a le plus souvent une prétention universelle : il dit ce qui est bien ou mal, absolument, par exemple qu’il est mal de tuer un autre être humain. Elle se distingue du droit en ce que ses règles ne sont font pas l’objet d’une procédure pour être promulguées et respectées. Une convention sociale est un accord tacite entre les membres d’un groupe social qui définit un usage : par exemple, c’est une convention de se souhaiter bon appétit avant de passer à table dans notre société. Ces usages sont différents selon les sociétés.

Première hypothèse

A première vue, la morale semble bien n’être qu’une convention sociale, car les normes du bien et du mal sont relatives aux lieux et aux époques où l’on se trouve.

Deuxième hypothèse

Pourtant, il semble nécessaire de pouvoir juger moralement les conventions sociales elles-mêmes : on peut donc supposer qu’il y a d’autres sources d’obligation que la société à laquelle on appartient qui fournissent un fondement universel, et non plus relatif, aux jugements moraux.

Problématique

Cette question pose donc problème car on ne sait pas si la morale est relative ou universelle : quelle est la source de nos jugements moraux ?

Enjeux

Cette question a des enjeux moraux car il s’agit de savoir si on peut juger les normes morales de notre propre société sans faire preuve d’immoralisme, et celles des autres cultures sans faire preuve d’ethnocentrisme.

Annonce de plan

Dans un premier temps, nous étudierons la première hypothèse selon laquelle le bien et le mal sont relatifs aux groupes sociaux dans lesquelles nous vivons. Dans un deuxième temps, nous examinerons l’hypothèse qui considèrent que la morale a une source qui transcende les différences culturelles. Enfin nous essayerons de sortir de ce problème en montrant les limites de l’universalisme en morale.

Première partie - Hypothèse 1

La bien et le mal ont une origine sociale

Argument 1

Parce que la morale est relative selon les lieux, les époques et les groupes sociaux.

Exemple 1

Dans les milieux aristocratiques, au XVIe et au XVIIe siècles, tuer son adversaire en duel pour laver son honneur était le devoir d’un gentilhomme alors que le même acte venant d’un manant était jugé comme un crime. Encore aujourd’hui, on remet des médailles aux soldats qui tuent à l’étranger et on condamne le meurtre d’un simple citoyen.

Argument 2

Parce que juger moralement les autres cultures est un réflexe ethnocentrique qui conduit à la destruction de la diversité culturelle. Cet réflexe vient de la peur de l’étranger : chacun croit que sa morale est la seule, parce que l’idée que notre morale est relative menace la stabilité de nos structures psychiques et sociales.

Exemple 2

Lorsque les Etats européens ont colonisé les peuples d’Afrique et d’Amérique, ils ont considérés que les usages locaux étaient contraire à la morale chrétienne et ont contraint ces peuples à se conformer par la force à la morale européenne.

Argument 3

Parce que les interdits moraux de notre propre morale prennent leur source dans la culture chrétienne qui est liée à un groupe social particulier, celui des serviteurs

Exemple 3

La valorisation de la pitié s’explique par l’origine sociale de la morale chrétienne : ce sont les catégories sociales inférieures qui valorisent ces affects tandis que les aristocrates valorisent certaines formes de cruauté.

Références

  • Montaigne, Les Essais « Chacun appelle barbarie ce qui n'est pas de son usage »
  • Levi-Strauss, Race et histoire : « Le barbare c'est d'abord l'homme qui croit à la barbarie »
  • Nietzsche, dans La généalogie de la morale, explique que notre morale chrétienne prend sa source dans un groupe social déterminé, celui des esclaves.

Transition

Bilan (reprise des termes du sujet et réponse provisoire au problème)

La morale semble bien n'être qu'une convention sociale, puisqu'elle est différente selon les peuples et les époques. On croit pouvoir juger les autres parce que nous prenons nos propres opinions pour des normes universelles, à cause de l'habitude qui nous fait oublier que nos croyances morales ont une origine sociale.

Objection

Mais cette thèse pose problème car elle nous interdit de juger moralement les conventions sociales, même les plus choquantes pour la morale européenne (par exemple l’excision), au nom du refus de l'ethnocentrisme. Peut-on dépasser le relativisme ? Y a-t-il des sources d’obligation morale qui seraient transcendantes (=supérieures) aux conventions sociales ?

Deuxième partie - Hypothèse 2

La morale a des sources transcendantes aux normes sociales

Argument 1

Parce que nous pouvons juger une convention sociale au nom de commandements religieux qui lui sont supérieurs.

Exemple 1

Au XIXe siècle, es Quaker américains s’opposent à l’esclavage alors légal aux Etats-Unis au nom de leurs principes religieux, qu’ils estiment supérieurs aux conventions sociales.

Argument 2

Parce que nous pouvons juger une convention sociale au nom de la conscience morale. Il y a en nous un sentiment moral qui ne dépend pas seulement de notre appartenance à un groupe particulier.

Exemple 2

Les objecteurs de conscience : même si l’usage dit qu’il est juste de tuer à la guerre, certains individus s’opposent à l’ordre d’aller combat au nom de leur conscience morale.

Argument 3

Parce que la raison est une source d’obligation morale universelle qui nous commande de toujours respecter autrui en tant qu’il est lui aussi un être de raison.

Exemple 3

Le fonctionnaire nazi Eichmann, lors de son procès à Jérusalem, s’est défendu de l’accusation de crime contre l’humanité en affirmant qu’il n’avait fait qu’obéir aux ordres : si la morale n’était qu’une convention sociale, cette défense serait acceptable. Mais si on considère que la raison est une source légitime d’obligation morale, alors on peut estimer qu’Eichmann aurait du écouter la loi morale en lui et refuser d’organiser l’assassinat systématique des Juifs.

Référence

Kant, dans Les fondements de la métaphysique des mœurs, explique pourquoi la raison est le fondement de l’obligation morale et formule ainsi la loi morale : "Agis de telle sorte que tu traites l'humanité aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre toujours en même temps comme une fin, et jamais simplement comme un moyen" (Deuxième formulation)

Transition

Bilan (reprise des termes du sujet et réponse provisoire au problème)

La morale semble bien avoir des sources transcendantes aux conventions sociales car on peut juger celles-ci au nom de la religion, de notre conscience ou de la raison. Cette thèse correspond à ce qu’on appelle l’universalisme moral.

Objection

Mais cette thèse pose également problème car elle ne résout pas le problème de l’ethnocentrisme, c’est-à-dire le fait de prendre une conduite simplement différente pour une conduite mauvaise. La colonisation a montré les conséquences dramatiques que pouvait avoir cette attitude. Pour éviter de telles conséquences, nous allons examiner les limites de l’universalisme en morale.

Troisième partie - Sortie du problème

Les limites de l’universalisme en morale

Argument 1

Parce que il y a plusieurs religions universelles, comme il y a plusieurs morales : comment savoir quelle est la bonne source de jugement ?

Exemple 1

La pluralité de religions qui se considèrent chacune comme la seule légitime mène à l’intolérance et aux persécutions religieuses, par exemple celles des protestants par les catholiques au XVIe siècle.

Argument 2

Parce que la conscience est un sentiment trop trompeur pour fournir une source fiable de jugement moraux.

Exemple 2

Il arrive souvent que j’ai le sentiment qu’une conduite est bonne, puis qu’avec l’expérience ma conscience morale se modifie : par exemple, on peut grandir sans que manger de la viande produise la moindre émotion, puis être révolté par cette pratique après avoir découvert les conditions d’élevage animalier.

Argument 3

Parce que la raison est abstraite et ne fournit qu’un cadre général à nos conduites, sans prescrire ou interdire des comportements particuliers : elle ne suffit donc pas à formuler des jugements moraux précis.

Exemple 3

La question du port du voile montre bien les insuffisance de la pure rationalité car on peut autant le dénoncer que le défendre à partir de la loi morale qui commande de toujours respecter autrui : en effet, on peut considérer que le port du voile est une atteinte au respect des personnes car il crée des discriminations entre les hommes et les femmes ; mais on peut aussi considérer que son interdiction est une atteinte à la dignité des personnes car elle ne respecte pas le libre choix des femmes qui décident de le porter.

Conclusion

Résumé des trois parties

Nous avons d’abord montré que les jugements moraux étaient relatifs selon les lieux, époques et groupes sociaux, ce qui nous a amené à conclure que la morale était une convention sociale. Mais la nécessité de pouvoir juger moralement certaines conventions sociales injustes nous a mené à examiner différentes sources extra-sociales de la morale : la religion, la conscience et la raison. Celles-ci ne règlent cependant pas le problème de l’ethnocentrisme. C’est pourquoi dans un dernier moment nous avons étudié les différentes limites de l’universalisme en morale, qu’il s’appuie sur un fondement religieux, sensible ou rationnel.

Enjeux de la réponse proposée

Si nous prenons cette réponse au sérieux, les conséquences sont qu’on peut juger moralement une norme sociale, car la morale ne se réduit pas à une simple convention, mais ce jugement ne peut jamais être absolu car aucune source d’obligation morale n’est absolument suffisante. Il demande à être élaboré dans chaque situation particulière.

Suite du contenu
Créez un compte pour lire la fiche complète.
Cette fiche est uniquement disponible pour les utilisateurs babaccool.
Si vous êtes nouveau sur Babaccool, créez un nouveau compte et on vous offre la première fiche.
S'inscrire avec un email
Vous avez déjà un compte ? Connectez-vous